22
Un voyage à dos de gryf
Tarzan et Jane longèrent le rivage de Jad-bal-lul et traversèrent la rivière en amont du lac. Ils voyageaient sans se presser, en veillant à leur confort et à leur sécurité car, maintenant que l’homme-singe avait retrouvé son épouse, il était décidé à ne plus prendre aucun risque et à ne rien faire qui pût entraîner une nouvelle séparation ou retarder, voire empêcher leur fuite de Pal-ul-don. Comment ils feraient pour retraverser les marécages, cela ne le préoccupait pas pour le moment. Il aurait le temps de prendre le problème en considération quand on y arriverait. Leur bonheur d’être à nouveau réunis, après une aussi longue séparation, suffisait à remplir des heures enchantées. Ils avaient beaucoup de choses à se dire : chacun avait passé par tant d’épreuves, de vicissitudes et d’étranges aventures que tout ce qu’ils avaient vécu depuis leur dernière rencontre valait la peine d’être raconté.
Tarzan avait l’intention de prendre un chemin conduisant au nord d’A-lur, en évitant les villages ho-don. On passerait ensuite entre ceux-ci et les montagnes, en évitant donc, dans la mesure du possible, aussi bien les Ho-don que les Waz-don. Il y avait là, en effet, une sorte de territoire neutre que n’habitaient ni les uns ni les autres. Plus tard on prendrait la direction du nord-ouest jusqu’à Kor-ul-ja, où Tarzan comptait s’arrêter pour saluer Om-at et lui donner des nouvelles de Pan-at-lee. Il envisageait de soumettre au gund un plan destiné à assurer l’heureux retour de celle-ci parmi les siens. Ils en étaient à leur troisième jour de marche et avaient presque atteint la rivière qui arrose A-lur quand, tout à coup, Jane saisit le bras de Tarzan et pointa le doigt vers la lisière d’une forêt, droit devant eux. On y distinguait, malgré l’ombre des arbres, une masse énorme. L’homme-singe la reconnut instantanément.
— Qu’est-ce que c’est ? murmura Jane.
— Un gryf, répondit-il. Voilà une rencontre qui se déroule dans les plus mauvaises conditions possible. Pas de grand arbre à un quart de mille à la ronde, en dehors de ceux sous lesquels il se trouve. Viens, nous devons rebrousser chemin, Jane. Je ne veux plus prendre de risques avec toi. Le mieux est de prier qu’il ne nous découvre pas.
— Et, si c’est le cas ?
— Alors il faudra bien prendre des risques.
— Lesquels ?
— Il faudra espérer que je parvienne à le dompter, comme j’ai dompté naguère un de ses pareils. Je t’ai raconté cela. Tu te souviens ?
— Oui, mais je n’imaginais pas une créature aussi gigantesque. Mon Dieu, John, elle est grande comme un bateau de guerre !
L’homme-singe éclata de rire.
— Non, quand même pas ! Mais j’admets que, quand il charge, il est aussi impressionnant.
Ils s’éloignèrent lentement, pour ne pas attirer l’attention de l’animal.
— Je crois que nous y arriverons, chuchota Jane, la voix étranglée par l’émotion.
Mais un grondement sourd roula dans le bois, semblable au tonnerre dans le lointain. Tarzan hocha la tête.
— Le spectacle va commencer sous le grand chapiteau, ricana-t-il.
Il serra brusquement sa femme contre lui et l’embrassa.
— On ne peut rien prédire, Jane, ajouta-t-il. Nous ferons de notre mieux. Nous ferons tout notre possible. Donne-moi ta lance… et ne cours pas ! Tout notre espoir réside plus dans ce petit cerveau que dans le nôtre. Si je réussis à le dominer, tout ira bien. Voyons cela.
L’animal venait de sortir de la forêt et tournait de tous côtés ses yeux myopes. Il cherchait manifestement une proie. Tarzan éleva la voix, faisant entendre les sons étranges de l’appel des Tor-o-don : Ouî oû ! Ouî oû ! La grosse bête s’immobilisa et resta un moment sans bouger, l’attention attirée par le cri. L’homme-singe s’avança droit devant lui, Jane Clayton à ses côtés. Ouî oû ! cria-t-il encore une fois, d’un ton plus péremptoire. Le gryf répondit en faisant vibrer son vaste poitrail d’un grondement sourd. Après quoi il se dirigea sans se presser vers eux.
— Très bien ! s’exclama Tarzan. Les dieux nous sont favorables. Tu ne me feras pas de crise de nerfs ? Mais je n’ai pas besoin de poser cette question.
— Je ne crains rien lorsque je suis avec Tarzan, seigneur des singes, répondit-elle doucement.
Elle le sentit lui presser tendrement l’épaule. Ils approchaient toujours de ce monstre gigantesque, venu des époques antédiluviennes. Ils se retrouvèrent enfin dans l’ombre de son épaule monumentale. Ouî oû ! cria Tarzan et il frappa l’horrible museau avec la hampe du javelot. La réponse espérée ne se fit pas attendre : une tentative sournoise de mordre, qui n’atteignit pas son but – et qui n’était, bien entendu, pas destinée à l’atteindre.
— Viens, dit Tarzan.
Prenant Jane par la main, il lui fit faire le tour du monstre jusqu’à la large queue qu’ils escaladèrent pour s’installer sur la crête du dos.
— Maintenant, nous allons chevaucher à la manière de nos lointains ancêtres. À côté de cela, la pompe de nos rois modernes n’est que broutille. Que dirais-tu d’un petit galop sur les pelouses de Hyde Park, avec une monture telle que celle-ci ?
— Je craindrais que notre style d’équitation ne choque les bobbies, s’écria-t-elle dans un rire.
Tarzan guida le gryf dans la direction qu’il voulait suivre. Ni les talus les plus raides, ni les rivières ne représentaient un obstacle pour la bête volumineuse.
— C’est un char d’assaut préhistorique ! assura Jane.
Ils continuèrent leur chemin en riant et en bavardant. Soudain le gryf fut à découvert, dans une petite clairière où une douzaine de guerriers Ho-don se prélassaient à l’ombre d’un arbre isolé. En apercevant l’animal, ils bondirent sur leurs pieds, consternés, puis poussèrent de tels cris que le gryf les chargea au son d’un terrible beuglement de colère. Les guerriers se mirent à fuir dans toutes les directions, tandis que Tarzan multipliait les coups de lance sur le nez de l’animal pour tenter de le retenir. Il y parvint enfin, au moment où le gryf allait rattraper un pauvre diable qu’il semblait avoir spécialement choisi pour gibier. Avec un grognement courroucé, le gryf s’arrêta net. Blanc de terreur, l’homme ne lança qu’un regard derrière lui et disparut dans la jungle.
L’homme-singe était plus que satisfait. Il avait craint de ne pouvoir maîtriser la bête si elle persistait à vouloir charger, et il avait déjà envisagé d’avoir à se passer de ses services avant d’atteindre Kor-ul-ja. Il changea donc d’avis. On irait à dos de gryf jusqu’au village d’Om-at, et les Kor-ul-ja auraient de quoi causer au coin du feu pendant des générations. Ce projet ne relevait pas seulement du goût instinctif de l’homme-singe pour les gestes théâtraux. Tarzan pensait aussi à la sécurité de Jane : tant qu’elle chevaucherait la plus redoutable créature de Pal-ul-don, elle resterait à l’abri des hommes et des bêtes.
Ils cheminèrent lentement vers Kor-ul-ja, l’allure naturelle du gryf étant loin d’être rapide. Pendant ce temps, une poignée de guerriers terrifiés arrivaient pantelants à A-lur, en semant sur leur route le récit d’un nouvel exploit du Dor-ul-otho. Cependant aucun d’eux n’osait l’appeler ainsi à haute voix. Ils l’évoquaient sous le nom de Tarzan-jad-guru, lorsqu’ils racontèrent l’avoir rencontré montant un gryf en compagnie de la belle étrangère dont Ko-tan aurait voulu faire la reine de Pal-ul-don. On rapporta cette histoire à Lu-don, lequel fit appeler les guerriers en cause qui subirent de sa part un interrogatoire serré. Ils finirent par le convaincre qu’ils disaient la vérité et lui indiquèrent la direction dans laquelle le couple voyageait, Lu-don en déduisit qu’ils se rendaient à Ja-lur, pour rejoindre Ja-don. Il fallait à tout prix empêcher cela. Comme il en avait l’habitude en cas de nécessité, il appela Pan-sat en consultation et les deux hommes conférèrent longuement. Ils ne se quittèrent qu’après avoir mis un plan au point. Pan-sat regagna aussitôt ses appartements, où il enleva son masque et ses ornements sacerdotaux pour les troquer contre l’équipement et les armes d’un guerrier. Ensuite, il retourna chez Lu-don.
— Bien, s’écria celui-ci en le voyant. Même tes commensaux et tes esclaves qui te servent jour et nuit ne te reconnaîtraient pas. Ne perds pas de temps, car tout dépend de la vitesse avec laquelle tu agiras. Et… souviens-toi ! Tue l’homme si tu peux, mais ramène-moi coûte que coûte la femme vivante. As-tu compris ?
— Oui, maître, répondit le religieux.
Peu de temps après, un guerrier solitaire sortait d’A-lur et prenait la route du nord-ouest, en direction de Ja-lur.
Il y a dans la montagne, immédiatement au-dessus de Kor-ul-ja, une gorge inhabitée. C’est l’endroit que le prudent Ja-don avait choisi pour rassembler son armée, avant de descendre sur A-lur. Deux considération avaient motivé sa décision. D’une part, s’il parvenait à agir à l’insu de l’ennemi, il aurait l’avantage d’attaquer par surprise les forces de Lu-don, dans un secteur où on ne l’attendait pas. De l’autre, il maintenait ses hommes à l’écart des villes, où d’étranges rumeurs circulaient déjà, concernant l’arrivée de Jad-ben-otho en personne pour aider le grand prêtre dans sa guerre contre Ja-don. Il fallait des cœurs bien trempés et d’une fidélité à toute épreuve pour ignorer la menace de vengeance divine que ces racontars laissaient présager. Il y avait déjà eu des désertions et la cause de Ja-don s’en trouvait gravement compromise.
Les choses en étaient là quand une sentinelle, postée sur une hauteur à l’entrée de la gorge fit savoir qu’elle avait aperçu, dans la vallée, ce qui lui paraissait être, de loin, rien de moins que deux personnes montées sur le dos d’un gryf. L’homme rapporta qu’il les avait entrevues alors qu’elles passaient à découvert. Elles semblaient remonter le torrent vers Kor-ul-ja.
Ja-don fut d’abord tenté de mettre en doute la véracité de ce récit, mais, comme tous les bons généraux, il tenait à vérifier les moindres renseignements, fût-ce les plus invraisemblables ; c’est pourquoi il se rendit lui-même sur la hauteur en question, afin de savoir ce que la sentinelle avait véritablement vu, compte tenu des déformations dictées par la peur. Il venait à peine de prendre place à côté du soldat que ce dernier lui toucha le bras et pointa l’index.
— Ils se sont rapprochés, murmura-t-il, on les voit très bien.
Aucun doute : Ja-don découvrit, à moins d’un quart de mille, un spectacle qu’il ne lui avait jamais été donné de contempler malgré sa longue expérience des gens et des choses de Pal-ul-don. Deux êtres humains chevauchaient la vaste échine d’un gryf. Il commença par ne pas en croire ses propres yeux, mais il dut se rendre à l’évidence : ces deux créatures ne pouvaient être autre chose que ce qu’elles étaient ! Puis, il reconnut l’homme. Alors il se leva et poussa un cri :
— C’est lui ! C’est le Dor-ul-otho lui-même !
Le gryf et ses passagers entendirent la voix, mais pas ce qu’elle disait. Le premier mugit effroyablement et détala dans la direction du mamelon rocheux. Suivi par quelques-uns de ses guerriers les plus intrépides, Ja-don courut à sa rencontre. Soucieux d’éviter une bagarre inutile, Tarzan essaya de retenir l’animal. Mais, comme sa monture était peu traitable, il lui fallut plusieurs minutes pour lui imposer sa volonté. C’est la raison pour laquelle les deux parties étaient très proches l’une de l’autre lorsque l’homme-singe réussit à stopper la charge folle du monstre déchaîné.
Entre-temps, Ja-don et ses guerriers avaient réalisé que la créature mugissante se jetait sur eux avec de mauvaises intentions. Laissant là toute intrépidité, ils avaient grimpé aux arbres, tous d’un même élan. Ce fut au-dessous d’un de ces arbres que Tarzan arrêta finalement le gryf. Ja-don le héla.
— Nous sommes des amis ! Je suis Ja-don, chef de Ja-lur. Mes guerriers et moi nous prosternons devant le Dor-ul-otho et le prions de bien vouloir nous aider dans notre combat légitime contre Lu-don, le grand prêtre.
— Vous ne l’avez pas encore battu ? demanda Tarzan. Mais je croyais que tu étais roi de Pal-ul-don depuis longtemps.
— Non, répondit Ja-don. Les gens craignent le grand prêtre et, maintenant qu’il a reçu au temple la visite de quelqu’un qui se prétend Jad-ben-otho, une grande partie de mes troupes ont peur. Mais, si elles apprennent que le Dor-ul-otho est revenu et a embrassé la cause de Ja-don, je suis sûr de la victoire.
Tarzan réfléchit une longue minute avant de répondre :
— Ja-don, dit-il, était de ceux, si peu nombreux, qui ont cru en moi et qui m’ont traité avec loyauté. J’ai une dette à acquitter envers Ja-don. Et Lu-don a des comptes à me rendre, non seulement en ce qui me concerne personnellement, mais surtout à cause de mon épouse. J’irai avec toi, Ja-don, pour infliger à Lu-don le châtiment qu’il mérite. Dis-moi, chef : comment le Dor-ul-otho peut-il le mieux servir le peuple de son père ?
— En venant avec moi à Ja-lur et dans les villages des alentours, répondit aussitôt Ja-don. Nous montrerons alors au peuple que tu es bien le Dor-ul-otho et les gens se rallieront à ma cause.
— Penses-tu qu’ils croiront en moi, plus qu’auparavant ? demanda l’homme-singe.
— Qui oserait douter que celui qui chevauche le grand gryf est un dieu ? rétorqua le vieux chef.
— Et si je t’accompagne à la bataille d’A-lur, demanda encore Tarzan, peux-tu assurer la sécurité de mon épouse tout le temps que je serai parti ?
— Elle restera à Ja-lur, avec la princesse O-lo-a et mes propres femmes, répondit Ja-don. Elle y sera en sûreté : je laisserai dans la ville des guerriers de confiance afin de les protéger toutes. Dis-moi que tu viendras, ô Dor-ul-otho, et je déborderai de bonheur car, en ce moment même, Ta-den, mon fils, marche sur A-lur à la tête d’une force recrutée dans le Nord-Ouest. Si, avec l’aide du Dor-ul-otho, nous attaquons par le Nord-Est, nos armes seront victorieuses.
— Je ferai ce que tu me demandes, Ja-don. Seulement, tu dois d’abord m’apporter du gibier pour mon gryf.
— Il y a de nombreuses carcasses au camp là-haut, étant donné que mes hommes n’ont pas grand-chose d’autre à faire que chasser.
— Bien. Apporte-les-moi tout de suite.
On s’empressa de lui procurer une provision de viande et l’homme-singe descendit de son féroce destrier afin de le nourrir de sa propre main.
— Veille à ce qu’il ait toujours quantité de nourriture, dit-il à Ja-don.
Il supposait en effet que cette bête vicieuse ne resterait soumise que si l’on veillait à sa nourriture.
On attendit le matin pour lever le camp et prendre le chemin de Ja-lur. Tarzan retrouva le gryf couché là où il l’avait laissé la nuit précédente, à côté des carcasses de deux antilopes et d’un lion, dont le gryf s’était repu.
— Et les paléontologistes prétendent qu’il est herbivore, fît remarquer Tarzan en s’approchant de la bête avec Jane.
On avait prévu de se rendre à Ja-lur en traversant les villages où Ja-don espérait soulever l’enthousiasme en faveur de sa cause. Une troupe de guerriers y précéda Tarzan, dans le but de préparer dûment le peuple, non seulement à la vue du gryf, mais aussi à accueillir selon son rang le Dor-ul-otho. Les résultats furent à la mesure des espoirs de Ja-don et aucun des villages où ils passèrent ne douta de la divinité de l’homme-singe.
À l’approche de Ja-lur, un étrange guerrier se joignit à eux. Personne, dans la suite de Ja-don, ne le connaissait. Il dit venir d’un des villages du Sud, où il avait été traité de façon déloyale par l’un des alliés de Lu-don. Pour cette raison, il avait déserté la cause du grand prêtre et pris la route du Nord, dans l’espoir de trouver refuge à Ja-lur. Tout renfort étant le bienvenu, le vieux chef permit à l’étranger de l’accompagner et celui-ci pénétra donc dans Ja-lur avec lui.
Se posait à présent la question de savoir ce que l’on ferait du gryf tant qu’on resterait en ville. Tarzan avait éprouvé les pires difficultés à empêcher cet animal susceptible d’attaquer quiconque l’approchait au moment où on l’avait mené au camp de Ja-don, dans la gorge déserte voisine de Kor-ul-ja. Durant la marche vers Ja-lur, en revanche, la créature avait semblé s’accoutumer à la présence des Ho-don.
À vrai dire, ces derniers ne l’importunaient guère d’autant qu’ils s’en tenaient le plus loin possible – et, quand on passa par les rues de la ville, les habitants eurent la prudence de l’observer des fenêtres ou des toits. Malgré cette apparente domestication, Tarzan se dit qu’on n’accepterait pas de gaieté de cœur de laisser le gryf errer librement en ville. Il fut finalement décidé qu’on l’enfermerait dans un enclos, à l’intérieur des murs du palais. Tarzan l’y conduisit après en avoir fait descendre Jane. On jeta dans l’enclos une grande quantité de viande et on laissa l’animal seul. Les habitants du palais ne s’aventurèrent même pas à escalader le mur pour le regarder.
Ja-don conduisit Tarzan et Jane aux appartements de la princesse O-lo-a qui, dès qu’elle aperçut l’homme-singe se jeta à ses pieds et se prosterna. Pan-at-lee lui tenait compagnie et semblait, elle aussi, heureuse de revoir Tarzan-jad-guru. Quand elles apprirent que Jane était sa femme, elles la considérèrent comme son égale, ou peu s’en faut, car même le plus sceptique des guerriers de Ja-don était à présent convaincu de recevoir un dieu et une déesse dans la ville de Ja-lur. Grâce à leur aide et à leur pouvoir, on était sûr que la cause de Ja-don l’emporterait bientôt et que le vieux lion prendrait place sur le trône de Pal-ul-don.
O-lo-a apprit à Tarzan que Ta-den était revenu et qu’on allait bientôt les unir, elle et lui, par les liens du mariage, suivant les rites de leur religion et en accord avec la coutume de leur peuple. Cela, dès qu’aurait pris fin la bataille à livrer dans A-lur.
Les recrues se bousculaient maintenant dans la ville et l’on décida que, dès le lendemain, Ja-don et Tarzan retourneraient au camp secret pour en ramener le gros des troupes. Aussitôt après, on profiterait de la nuit pour attaquer en force les guerriers de Lu-don retranchés à A-lur. On en fit avertir Ta-den, afin qu’il attende avec ses guerriers sur la rive nord de Jad-ben-lul, à quelques milles de la capitale.
Pour mettre ce plan à exécution, il était nécessaire de laisser Jane au palais de Ja-don, à Ja-lur, mais O-lo-a et ses femmes resteraient avec elle et un nombre suffisant de guerriers seraient commis à leur garde. Aussi Tarzan prit-il congé de son épouse sans éprouver d’appréhension. Monté sur le gryf, il sortit de la ville avec Ja-don et son escorte.
À l’entrée de la gorge déserte, l’homme-singe abandonna sa monture qui ne lui servait plus à rien puisqu’elle ne jouerait aucun rôle dans l’attaque d’A-lur, avant l’aube : du moment que l’ennemi ne pourrait rien voir, l’effet d’une apparition à dos de gryf devait être tenu pour négligeable. Quelques coups de javelot renvoyèrent le grand animal, grognant et ronchonnant, dans la direction de Kor-ul-gryf. L’homme-singe n’était pas mécontent de le voir s’en aller car il n’avait jamais été sûr que son tempérament inconséquent et son appétit insatiable ne le feraient pas se retourner contre un de ses alliés.
Dès l’arrivée au camp, on se prépara à marcher sur A-lur.